1948: Vaccination Obligatoire le TABDT
Il y a 62 ans, avant le COVID 19, une autre vaccination était obligatoire. La vaccination contre la Diphtérie, le Tétanos, la Typhoïde, et les paratyphoïdes A et B (TABDT).
Comment s’organisait cette vaccination au sein des territoires en 1948 à la sortie de la guerre?
Extrait de « Souvenirs d’un médecin de campagne » de Jacques Farisy, né en 1923 à Confolens, il fait ses études de médecine à Poitiers mais il passe toutes les vacances chez sa grand-mère à la campagne au milieu des paysans.
En 1951, il s’établit à Usson-du-Poitou.
La vaccination contre la diphtérie, le tétanos, la typhoïde, et les paratyphoide A et B (TABDT) est obligatoire depuis 1938, mais, en raison de la guerre, l’application de cette mesure attendra jusqu’en 1948.
Elle concerne tous les jeunes nés avant 1945. Ceux nés après 1945 sont recensés dans un autre chapitre, vaccinés individuellement par leur médecin traitant ou en séances publiques dans les mairies.
Je ne traiterai que des séances de 1948.
L’âge des bénéficiaires s’étale de cinq à trente ans. Quelques cas particuliers obligent
à vacciner des personnes plus âgées.
Ce sont des centaines d’individus à vacciner.
Cette tâche est confiée aux médecins de campagne désignés par la préfecture.
Le médecin d’U… a la responsabilité de quatre communes, soit une population de quatre mille habitants.
Il ne peut pas, comme ses autres confrères, assumer seul ce travail. Il fait appel aux internes de l’hôpital de Poitiers.
Je viens à U… trois fois (une fois toutes les deux semaines), pendant deux jours, à raison de trois heures le matin et trois heures l’après-midi.
Organisation des séances:
Le lieu : la mairie.
Les sujets : les « vaccinables », porteurs de leur convocation, d’une pièce d’identité, d’un flacon d’urine (ou d’un résultat d’analyse par un pharmacien).
Le personnel : le secrétaire de mairie, le garde champêtre pour assurer la discipline, une sage-femme (il n’y a pas d’infirmières dans les campagnes), le vaccinateur.
Le matériel : une lampe à alcool à brûler, deux casseroles, un broc d’eau de cinq litres, une cuvette émaillée pour recueillir les urines après analyse, un « haricot », deux seringues de dix centimètres cubes, quatre boîtes de vingt-cinq aiguilles hypodermiques, des ampoules de vaccin de dix centimètres cubes, un paquet de coton hydrophile, un flacon d’alcool à quatre-vingt-dix degrés, deux tubes à essais.
Le rôle de chacun :
– le secrétaire de mairie vérifie la liste des
vaccinables : les absents, les excusés, les malades à ne pas vacciner, etc. ;
-la sage-femme effectue les analyses d’urine. Elle surveille que l’eau bout en permanence dans la casserole sur la lampe à alcool. L’analyse doit détecter la présence d’albumine car, si elle est positive, le candidat sera éliminé et son médecin traitant informé ;
– Le vaccinateur utilise une des seringues de dix centimètres cubes dans laquelle il aspire la totalité d’une ampoule de vaccin. Il adapte une aiguille qu’il prend dans la casserole, où elles subissent l’ébullition. Il utilise un tampon de coton hydrophile qu’il imbibe d’alcool et injecte un centimètre cube dans une des fosses sus-épineuses du patient. Il enlève l’aiguille puis la met à tremper à nouveau dans l’eau en perpétuelle ébullition.
Il prend une autre aiguille et les opérations se succèdent..
Les incidents ?
Le vaccinateur oublie de changer d’aiguille..
– Le vaccinateur utilise le même tampon alcoolisé sur plusieurs clients..
– Le receveur hurle de douleur après l’injection du vaccin : l’examen de l’aiguille dévoile qu’elle est émoussée… à éliminer ! …
– La dose injectée est de deux centimètres cubes mais souvent la dose sera de zéro virgule huit ou de un virgule trois..
Conclusion:
Tout se passe bien, il n’y aura aucune complications, pas d’abcès secondaires.
Une remarque : le vaccinateur et la sage-femme ne portaient ni blouse blanche, ni bon-
net, ni gants, ni masque !